Ma nouvelle interview sera celle de Maïwenn Soler
Auteure de
4ème de couverture
Tout commence par une carte ne se référant à rien de connu, soulignée d'inscriptions incompréhensibles. Puis, ce sont ces quelques phrases, que Raïlyan de Preyloy, cartographe, découvre dans un ouvrage de la bibliothèque royale : ""Jadis, ils se dispersèrent aux quatre vents. Leur foyer était devenu trop petit, ou bien étaient-ce eux qui [étaient devenus trop] nombreux. Ils s'égaillèrent un peu partout, emportant avec eux une branche de leur arbre-maître." Fasciné, il décide d'en apprendre plus et finit par découvrir de nombreux textes similaires. Tous mentionnent une mystérieuse civilisation, oubliée de tous. C'est en allant à la recherche de ce peuple, les Abouteurs, qu'il aborde une île, un monde à part où le temps s'écoule de manière différente, un monde de sagesse, construit autour d'un arbre qui détient le savoir mais aussi la mémoire dune civilisation disparue.
Interview
1/
Peux-tu me parler un peu de toi ?
En
tout premier lieu, je suis maman d’un petit garçon. Mariée, j’ai 32 ans, et
j’exerce le métier de maquettiste PAO bien que j’ai fait des études en
archéologie. Je vis dans un petit village de Seine-et-Marne. Je suis une grande
rêveuse, et j’ai toujours adoré lire. D’aussi loin que je me souvienne, il y a
toujours eu un livre avec moi, et cela continue !
2/
Comment devient-on écrivain ?
Je
ne pense pas qu’on décide un jour de devenir écrivain, comme ça. Cela se fait
petit à petit, à force de lecture, de plonger dans des univers imaginés par
d’autres et de rêver aussi. On en vient à se dire que, soi-même, on aurait
placé telle scène, évoqué telle situation, et de là, il n’y a qu’un pas avant
de prendre un stylo et de rédiger un premier texte imaginaire. Me concernant,
ça s’est fait tout naturellement, à force de ne pas toujours être totalement
satisfaite de mes lectures. J’ai alors créé des histoires telles que j’avais
envie de les lire.
3/
Qui t’as donné le goût de la lecture et de l’écriture ?
Bonne
question. La lecture me vient sans doute de ma mère, qui me lisait beaucoup
d’histoires quand j’étais enfant. Et aussi de la solitude : je résidais
dans une autre ville que celle où j’allais à l’école, alors retrouver mes
copains de classe après les cours, c’était difficile. Et puis l’envie de
m’évader, de plonger dans mes univers où tout est possible.
L’écriture
découle de la lecture je pense. Petite j’aimais bien composer de petits poèmes,
et moduler un univers bien spécifique dans
ma tête, rêver éveillée en somme. J’ai dû écrire mon premier véritable texte
vers l’âge de 14 ans, pour un devoir de classe. Ca m’a plu, d’imaginer, de
créer une histoire avec un début, une intrigue, une fin, des personnages,
un environnement. J’ai continué.
4/Comment
t’es venue l’idée d’écrire ce livre ?
Ce
livre découle d’une image, celle d’un arbre vivant, un genre de très vieil
homme sylvestre qui, comme toutes les vieilles personnes, a beaucoup vécu,
entendu, et se souvient. Un soir ça s’est imposé dans ma tête, et j’ai rédigé
le texte du quatrième chapitre de Eclats de rêves.
Ensuite, j’ai brodé autour, raconté l’histoire de cet arbre, des êtres qui
gravitaient dans son entourage, de son découvreur…
5/ Qu’est-ce
qui a été le plus dur à l’élaboration du roman ? (les idées, les
illustrations, l’éditeur …)
L’éditeur,
sans aucune hésitation. Travailler et retravailler mon texte en collaboration
avec ma correctrice n’a certes pas été de tout repos, mais ça m’a fait
progresser dans ma manière d’écrire et d’étudier mes textes. Par contre,
trouver un éditeur est un véritable parcours du combattant ! Je ne compte
pas les refus reçus, les échecs aux concours et les sans-réponses…
6/
Qui est le créateur des illustrations sur ton livre ?
L’illustration
de couverture est de Miguel Coimbra. C’est un illustrateur que j’admire
beaucoup pour la qualité de son travail, les détails, et sa précision
également. Lorsque j’ai reçu une réponse positive de la maison d’éditions, je
me suis mise à la recherche d’une illustration pour la couverture. Le site de
Miguel comprenait une vue panoramique d’un phare de biais, j’ai été séduite.
Après l’avoir contacté, je lui ai expliqué mon projet, et il a très bien su
retranscrire ce que j’avais en tête tout en utilisant l’image que j’avais appréciée
en premier lieu.
De
mon côté et pour mon plaisir personnel, j’ai réalisé plusieurs illustrations
graphiques autour de mon livre, cependant elles n’apparaissent pas à la
publication.
7/
Quelles ont été tes sources d’inspirations ? (une musique, un film, un
auteur …)
Il
y en tant ! La chanson de Within Temptation, « Forsaken »,
pour commencer. Elle raconte l’abandon,
la solitude, l’absence, la destruction d’un monde dont seules les ruines
subsistent. C’est aussi cette chanson (une partie du moins) qui m’a donné
l’idée du texte sur lequel je travaille actuellement.
Ensuite,
le monde qui m’entoure. Plus exactement, la société dans laquelle on vit
actuellement. Elle m’inspire d’écrire quelque chose de plus beau, de moins
monétaire et de plus humain.
Et
puis, les vieux récits des explorateurs de jadis, le départ vers l’inconnu.
Il
y aussi la recherche du passé, qui me vient de mes années d’étudiante :
comment, à partir de quelques artefacts découverts, on en arrive à
l’élaboration d’un monde, d’un mode de vie et d’une culture… C’est toute la
trame de ce livre : partir vérifier si de longues recherches sont réelles…
8/
Est-ce que le mythe de la page blanche existe-t-il vraiment ?
Oui.
Oh oui, dans le sens où je ne parviens pas à transcrire les idées qui tournent
dans ma tête. Concernant Eclats de rêves,
je n’ai pas eu trop d’hésitations, mais dans d’autres cas de textes plus
complexes, je me suis souvent heurtée à un mur, à un blocus. Les idées sont là,
mais il est impossible d’arriver à les écrire correctement. En règle générale, « la
page blanche » signifie pour moi que je vais trop vite. Je n’ai d’autre
choix que de poser mon stylo, de vaquer à ma vie, et puis un jour tout s’emboite
correctement et j’écris.
9/
Combien de temps faut-il pour écrire un roman de ce style ?
Eclats
de rêves a été écrit en trois
périodes. Le premier texte a été rédigé en quelques mois ; puis j’ai
laissé passé un très long moment (plus de six mois) avant de revenir dessus -
c’est cette partie qui s’est révélée la plus ardue, car j’ai ajouté plus de la
moitié du livre qu’il est actuellement. Ensuite, durant quelques semaines, j’ai
repris quelques passages sur les conseils de ma correctrice.
Au
total, j’ai passé trois ans dessus (avec des moments sans activité).
10/
Peux-tu nous dévoiler un petit extrait de ton livre ?
Voici.
Pour savoir qui parle, d’où il vient et où il va, il faut lire pratiquement
tout le livre….
J’ai froid dehors. J’ai chaud à
l’intérieur. Je n’en peux plus de ce calfeutrage en fond de cale. Je n’en peux
plus de ces embruns dès que je monte sur le pont. De ce roulis constant. De ce
sol qui sans cesse se dérobe à mes pieds, puis monte à ma rencontre sans
prévenir, pour me faire tomber. Je n’en peux plus de ces affrontements qui ont
détruit mon pays. Détruit ma terre, mes champs, mes forêts, ma maison. Détruit
mon monde, mon univers. Détruit ma vie avec ma famille. Ma compagne. Mes fils.
Je n’ai pu sauver que notre puînée. (…)
Le voyage dure depuis déjà des
jours, et nous occupons notre temps comme nous le pouvons, désœuvrés sur ce
fier vaisseau. (…)
La
petite attire mon attention. Que puis-je encore pour elle ? Juchée sur des
ajustements de bois et de cordages, elle fixe l’horizon. Mon horizon ?
Notre pays ? Je voudrais me détourner. (…) Je me contrains à regarder. À
découvrir, loin, très loin, cette vague forme drapée dans l’écume blanchâtre.
Je hausse un sourcil interrogateur à l’attention d’un marin proche. Son sourire
m’apaise, les quelques mots prononcés difficilement me tranquillisent.
« Port. Maison. » Pour la première fois
depuis plusieurs jours, il me semble respirer un peu mieux.
Au petit matin, nous sommes nombreux
sur le pont, à nous tasser contre le bord pour ne pas gêner nos bienfaiteurs.
Elle a grandi, désormais bien visible, mais encore si lointaine. Notre
destination. Notre refuge. Un vif éclat presque aveuglant la surplombe ;
il nous tire à lui tel un aimant. S’étage entre mer et nuages une forêt
d’ombres blanches et mouvantes qui, par leurs déplacements, parfois laissent
entrevoir d’infimes taches ocre. Qu’est-ce donc que ce monde de couleurs où
nous nous dirigeons ? La journée passe en contemplation. Pour la première
fois, je crois, nous avons un moment cessé de penser à nos malheurs. À notre
contrée certainement dévastée.
La
magie des Abouteurs, je crois bien, avait déjà commencé d’opérer.
11/
As-tu un roman en cours d’écriture ?
Oui.
J’ai beaucoup de projets d’écriture, et ai entrepris la rédaction de l’un
d’entre eux.
En
fait, je devrais dire trois d’entre eux, car il s’agit d’une trilogie. Sans
entrer dans les détails, l’histoire parle d’un monde délaissé par ses
habitants, d’un monde convalescent. Chaque tome va aborder l’une des régions de
ce monde (le pôle, l’équateur, l’au-delà), tout en racontant l’Histoire des
peuples qui y ont vécu. Tout comme Eclats de rêves,
il est inspiré pour partie de la chanson de Within Temptation, mais aussi et
surtout d’une série de tableaux réalisés par un artiste asiatique. J’ai
logiquement le titre (à moins que je ne change d’avis d’ici la fin de
l’écriture…) : l’héritage des âges…
12/
Un petit mot pour tes lecteurs ou futurs lecteurs ?
D’abord :
merci de me lire. Ensuite, écrivez-moi pour me dire ce que vous en avez
pensé !
J’espère
que mes dérives imaginaires leur permettent de s’évader et de rêver, et
j’espère aussi continuer à leur procurer ces moments d’envol pendant longtemps.
Je voudrais remercier Maïwenn pour le temps qu'elle a pris pour répondre à mes questions.
Vous pouvez la retrouver
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